Bienvenue sur des petites routes de montagne pour découvrir une magnifique restauration de Simca 1000 Rallye 2.
On pourrait penser l’endroit adapté pour cette Rallye, et il l’est de par la nature de cette voiture. Mais attention aux ravins qui bordent la route pour cette voiture populaire à sa sortie, devenue aujourd’hui presque inestimable tant elle est rare !
La voiture est basée sur la populaire Simca 1000, dont j’avais retracé sa genèse il y a quelques jours. Suite au succès, une version plus sportive fût développée dont voici quelques spécificités évoquée lors d’un essai avec le propriétaire.
Le moteur de la Simca 1000 Rallye 2
Lorsqu’il est en action, le quatre cylindres de 1,3 litre a un son incroyablement puissant malgré ses 86 ch.
A l’époque de la sortie de la voiture, l’atténuation des bruits n’était pas considéré par les ingénieurs. On recherchait simplement l’efficacité et les performances. Une insonorisation, rimait à des coûts supplémentaires, ainsi que du poids embarqué. Ajoutez à cela des pneus super collants et des amortisseurs raides comme la justice, et tout sentiment de normalité s’évapore.
Le propriétaire de la voiture, João Lacerda, compare sa Simca 1000 Rallye 2 à un kart, et l’analogie est pertinente.
La prise en main de la voiture est un retour en arrière vers une époque bien révolue. Le son est intense, on entends les deux carbus glouglouter goulument, ce qui fait mal au porte monnaie de nos jours ! Mais ne parlons pas de choses qui fâche et restons concentré sur la passion.
La boîte de vitesse est courte et légèrement imprécise au niveau de la commande. Il est facile de rater son coup si on à pas un minimum d’habitude avec la voiture.
Les pédales sont espacées de telle manière que vous devez contorsionner vos chevilles pour débrayer deux fois de manière efficace.
Avec peu de poids sur l’avant, la Simca s’élance d’avant en arrière, la direction est ultra-directe sans être trop communicative.
Une fois tout cela assimilé, on se détend, on se décontracte et on commence à composer avec les caractéristiques de cette voiture sportive à l’ancienne.
Lacerda, le propriétaire pilote de l’essai, n’est pas radin et a fait plusieurs aller/retours pour montrer les possibilités dynamiques de la Rallye.
Après une demi-heure passée à faire vrombir la Simca sur une piste de course de côte, on apprécie de plus en plus cette petite bombe.
On la sent agile et sans lourdeur, normal, elle ne pèse que 860 kg environ.
Les sensations sont folles, même si on peut avoir du mal à dépasser la plupart des habitants dans leur voiture moderne. Le parcours étant une des voies principale de Caramulo en semaine.
Pas de problèmes pour Lacerda, cette belle région du nord du Portugal est son territoire et la route fait partie de son trajet pour aller au travail.
La Simca a également connu beaucoup d’action sur ce site historique depuis sa restauration en 2011. Elle n’est pas ménagée, c’est certain, mais Lacerda a investi bien plus que de l’argent dans sa renaissance.
Cette voiture est un bijou de famille. Elle a été pilotée à l’époque par son père, Jerónimo, qui a malheureusement perdu sa bataille contre le cancer à un âge tragique.
Acheter la voiture et lui rendre sa perfection d’antan était devenu une obsession pour son fils. On le comprend, et c’est un magnifique hommage pour tout passionné d’automobile que le fils à fait à son père.
“Mon père a vécu dans un monde de voitures classiques et de courses automobiles”, explique Lacerda.
Son père, João, était le fondateur du “Museu do Caramulo” et a participé à plusieurs événements à Vila Real et sur d’autres circuits portugais.
“Il s’est également rendu à des compétitions internationales à Brands Hatch, Silverstone et Monaco en tant que spectateur, et a souvent emmené mon père avec lui. Il a ensuite commencé à courir en 1971, à l’âge de 21 ans, dans le Datsun 1200 Trophy.
“La série était très populaire à l’époque, et des stars portugaises comme Francisco Fino, Manuel Gião, Quico Ribeiro da Silva et Joaquim Moutinho ont débuté dans le championnat. Il s’est avéré compétitif parce que les voitures étaient utilisées dans des spécifications proches des normes du groupe 1.
“Les courses de mon père ont été interrompues à la fin de l’année 1972, lorsqu’il est parti combattre au Mozambique dans la guerre d’outre-mer (également connue sous le nom de guerre coloniale portugaise). Il a fait des essais occasionnels chaque fois qu’il était au Portugal, mais il n’a pas couru.”
Il est retourné sur la piste en 1975, dans la série nationale des voitures de tourisme, à bord de sa voiture de tous les jours, la Rallye 2 qui avait été utilisée auparavant par Santinho Mendes.
“Mon père utilisait des pneus slick lorsqu’il était sur les circuits”, explique Lacerda.
“Sinon, c’était une voiture du Groupe 1, donc, encore une fois, elle n’avait pas été modifiée, sauf sur les éléments de sécurité, comme l’arceau.
“Il a couru dans la catégorie 1300cc, et a fait ses débuts à Estoril en juillet mais a été contraint d’abandonner à cause d’une crevaison. Un mois plus tard, il a couru sur le circuit de Vila do Conde en Algarve, connu par certains comme notre circuit de Monaco, et a remporté sa catégorie.
“Il a ensuite décidé d’investir un peu d’argent et a envoyé la voiture à l’équipe Simca Racing de Lille. À cette époque, les Simca étaient très compétitives face à des voitures plus grosses et la Rallye 2 de mon père a reçu quelques améliorations. Malheureusement, il n’a pas eu l’occasion de la faire courir.”
Ravagé par sa maladie, Jerónimo est devenu un spectateur lorsque sa Simca nouvellement améliorée est revenue sur la piste d’Estoril à la fin de 1976.
“Il a demandé à João Nabais de la conduire à sa place. Il a dominé la catégorie mais a cédé sa place à Edgar Fortes dans le dernier tour”, raconte Lacerda.
“Edgar se battait pour le championnat. Mon père n’avait que 25 ans lorsqu’il est mort. Mon grand-père a ensuite vendu la Simca à un concessionnaire de voitures de course.”
La Rallye 2 a continué d’ammasser les victoires, et António Adam, qui l’a conservé, a prêté la voiture à Fortes pour une course de côte organisée à Penha en 1977, après que sa propre voiture ait été rejetée lors des contrôles techniques. Il a gagné sa catégorie.
La Simca a continué à participer à des courses de côte et à des courses automobiles en 1977, et Adam a participé aux 500 km d’Estoril de l’année suivante, mais n’a pas réussi à les terminer.
La Simca passe alors aux mains du vétéran Veloso Amaral, pilote de Hillman Imp et de Clan Crusader, qui développe encore la voiture et participe même au rallye du Portugal 1983, une manche du championnat du monde des rallyes.
Il n’a malheureusement pu tenir la distance. Le modèle commençant à dater, a été actif jusqu’en 1985 avant d’être finalement mis à la retraite.
João Lacerda n’avait jamais pensé à retrouver la vieille voiture de son père, jusqu’à ce que son cousin Tiago soit informé de son emplacement en 1994.
“J’avais vu des photos et des films personnels de mon père pilotant la Simca”, se souvient João Lacerda, “et j’étais sûr que la voiture serait un jour à moi. Mais je ne savais pas quand.
“Elle avait appartenu à deux autres personnes après Amaral et un jour, Tiago m’a donné le nom et les coordonnées de la personne qui la possédait. J’avais 18 ans à l’époque et je l’ai contacté immédiatement.
“La voiture se trouvait à Tomar, dans le centre du Portugal, et était en bon état, mais le propriétaire n’était pas prêt à la vendre. J’ai dû être patient.”
C’est le début d’une longue attente de 13 ans : “Fin 2007, il m’a contacté pour des pièces détachées pour une autre voiture. Je lui ai fait une offre pour la Simca et une semaine plus tard, elle était de retour à Caramulo”.
Bien qu’elle soit dans un état remarquablement sain et sans rouille, la voiture avait été accessoirisée avec toutes sortes de babioles, notamment des accessoires en plastique de style Rallye 3. “Elle avait été défigurée !” s’amuse Lacerda.
“En 2009, l’aventure de la restauration a commencé, le premier démontage ayant eu lieu dans les ateliers privés du Museu do Caramulo.
“J’ai toutefois envoyé le moteur à Lisbonne pour qu’il soit restauré par un véritable expert de ce type de voiture, Tobias Martins”.
“J’ai décidé de tout reprendre à zéro et j’ai commencé à enlever toute la peinture – les quatre couches – à la main.
“Je ne voulais pas endommager la carrosserie en la faisant sabler. C’était un processus très long, mais qui en valait la peine.
“Lorsque j’ai eu terminé, la carrosserie non peinte – l’essentiel du projet – était en très bon état. Elle est alors devenue une sorte de puzzle”.
Un puzzle dont il ne manquait que quelques pièces.
“J’ai décidé dès le départ que je restaurerais la voiture selon les mêmes spécifications que lorsque mon père a remporté sa catégorie sur le circuit de Vila do Conde en 1975”, explique Lacerda.
“J’ai eu l’immense chance de pouvoir emprunter une voiture similaire à mon ami Tiago Raposo de Magalhães, qui m’a servi de modèle.
“Le plus difficile a été de trouver les bons composants pour la boîte de vitesses. Cela, ainsi que quelques éléments de finition que j’ai trouvés sur eBay, chez des spécialistes en France, etc.
“Je tenais à conserver autant d’éléments d’origines que possible, et même les extincteurs que vous voyez ici sont ceux qui étaient sur la voiture quand elle était neuve.
“Ce qui a pris le plus de temps, c’est la reproduction des décalcomanies. Au bout d’un an environ, j’avais un gros kit à monter.”
Après une nouvelle peinture, une année supplémentaire a été consacrée à l’assemblage de la Simca, le seul écart par rapport au scénario étant l’ajout de quelques modifications au moteur.
Un arbre à cames plus aggressif et des Webers à la place du Solex d’origine ont permis d’obtenir “un peu plus de puissance et environ 1500 tr/min supplémentaires”.
L’objectif de la Simca nouvellement restaurée était le Caramulo Motorfestival 2011, sa première sortie en sport automobile depuis le rallye Camelias de 1985.
“J’ai terminé tous les travaux à peine une semaine avant et je n’ai pu faire que quelques essais”, se souvient Lacerda. “Il y avait quelques problèmes de démarrage, notamment le calage du distributeur, mais pas grand-chose. Je l’ai pilotée sur la course de côte et ce fut un moment très spécial.”
Lacerda possède plusieurs voitures intéressantes et a accès à plusieurs autres, mais la Simca est sans conteste sa préférée. On le comprend !
“Elle est très spéciale, évidemment, en raison du lien avec mon père. Cela, et pour l’effort que j’ai mis dans la restauration.”
“J’ai la chance que ma femme Cecilia soit également passionnée de course automobile et qu’elle adore la Simca, donc ce n’est pas seulement ma voiture. Je ne la vendrai jamais. La voiture appartient à Caramulo. Elle n’aurait jamais dû partir.”
Images : Manuel Portugal
Merci à Adelino Dinis et au Museu do Caramulo.
Bel article ! J’ai pris beaucoup de plaisir à lire ça sur ma pause café ! L’histoire de João et son hommage à son père sont très touchants. On sent la passion à chaque ligne. Ce blog est une vraie pépite que j’ajoute dans mes favoris 😉
Merci pour ton commentaire ! J’ai encore des articles en stock à venir, à très vite 🙂